Faut-il préférer une rédaction humaine ou générative ?
Ces dernières années, j’ai un peu délaissé mon blog pro. Le temps venant à manquer, j’ai essentiellement consacré mon travail d’écriture à la rédaction de mes quelques aventures sportives. Qui – pas besoin de s’en cacher – me donnaient une bien meilleure motivation au temps consacré à l’écriture !
Notamment, je suis fier de dire qu’il m’a fallu plus de 16 heures de rédaction pour rédiger un de mes plus gros récapitulatifs sportifs sur mon compte medium.com : mon aventure sur la Diagonale des Fous 2024. Car ce que j’ai vécu durant cet ultra-trail était tellement intense… Que le texte qui allait en découler ne pouvait qu’être dense à son tour ! Et quelques mois auparavant, j’avais déjà consacré 14 heures sur un autre gros texte : celui de mon aventure sur le triathlon XXL de montagne Embrunman 2024.
Avec l’avènement des outils de génération de contenu, ce temps d’écriture – sans aucune ambition pécuniaire – peut pourtant sembler totalement vain.
Alors… Pourquoi est-ce que je rédige ces récapitulatifs sportifs ?
La cible principale, ce sont ma famille et mes proches. Mais aussi et surtout mes enfants. Ils sont encore trop petits à l’heure actuelle pour découvrir les quelques aventures sportives que je retranscris. Mais j’avoue aussi considérer ces textes comme une forme d’héritage (c’est pour cette raison que je les imprime tous). Par exemple, je ne connais que très peu l’histoire de mes grands-parents. Mes grands-parents et arrière-grands-parents ont pourtant vécu les guerres mondiales du XXe siècle depuis les fronts français et russes. Parfois même depuis des camps dédiés aux officiers ! Et je n’ai que des bribes de souvenirs qui me sont parvenus. A part des grades militaires et quelques courtes anecdotes, je n’ai rien de tangible qui m’ait véritablement été partagé sur leur histoire. Ni sur leurs émotions. Finalement, même si je les ai côtoyés dans ma jeunesse, je les aurai finalement très peu connus…
Pour ma part – comme beaucoup d’occidentaux – mes journées sont rythmées par le travail et les petits tracas du quotidien. Mes enfants occupent beaucoup de notre temps aussi à ma femme et moi. Mes aventures sportives se situent donc dans un autre espace-temps. Et viennent ajouter un peu d’exotisme dans le train-train quotidien. D’autant que je ne sais pas de quoi sera fait l’avenir… Et je n’ai pas envie que mes enfants ne sachent rien de leur père. Et typiquement, rédiger un compte-rendu sportif, c’est aussi une manière de leur livrer une histoire personnelle. De leur laisser une trace. Qu’ils sachent qui je suis, ce que j’ai vécu… C’est donc un véritable travail de mémoire auquel je me soumet. Et c’est exactement la même chose que j’aurais aimé de mes aïeux par exemple.
Alors, Non : je ne rédige pas ces contenus avec comme objectif principal de les communiquer à tout le monde. Et de me la raconter sur les réseaux sociaux. Car ma problématique n°1, c’est d’abord de rédiger un contenu sincère. Et qui raconte une vraie expérience vécue de l’intérieur. J’essaye d’y retranscrire mon état physique et psychologique durant toutes ces différentes épreuves sportives. D’autant que toutes mes courses ne se déroulent pas toujours bien. A l’instar de ma déconvenue sur le Natureman, un triathlon format L dans le Verdon en 2020. Sportivement, j’y ai vécu un lamentable échec. Mais je suis fier d’avoir néanmoins partagé honnêtement ce que j’ai encaissé.
Rédiger ces récaps sportifs, c’est aussi une manière pour moi de coucher noir sur blanc mes propres émotions. Et me permettre de revivre l’événement à posteriori. De donner une seconde vie à mon expérience en quelque sorte. Voire de me donner du recul sur mes performances et mes contre-performances sportives. Pour faire mieux la prochaine fois. En gommant telle ou telle lacune.
Une autre raison me pousse à délivrer ces textes : j’aime écrire.
Tout simplement. Je ne cherche pas à avoir un style d’écriture particulier. Même si j’aime les textes faciles à lire. Avec des phrases courtes. Mais cet intérêt pour l’écriture ne trouve finalement de la saveur que lorsque le contenu est véritablement sincère. Et c’est cela qui me motive dans mes écrits. Je suis un gars finalement banal. Qui essaye de vivre des choses pas complètement banales. Et de les raconter, avec ses tripes.
Aujourd’hui, l’IA – couplée au Machine Learning – est capable de produire des montages photos et vidéos. Ou de générer un texte complet from scratch. Pour décrire un objet du quotidien sur un site e-commerce très institutionnel, je peux comprendre le gain de temps. Mais dans le cadre d’un véritable travail de rédaction – comme de nombreux sites le nécessitent (ou le méritent), j’avoue être perplexe.
Lorsque ChatGPT a été officiellement publié fin 2022, des centaines de livres sont apparus sur Amazon. Je ne pense pas que les écrivains en herbe se sont subitement tous rendus compte en en début d’année 2023 que le moment était enfin venu de publier leurs écrits. Le lien avec l’apparition de ChatGPT – et de ses homologues depuis – semble évident. Du coup, on se retrouve avec du contenu généré de manière froide par un humain à une machine. Le commanditaire peut-il être alors reconnu comme un véritable auteur ? Ferguson, Melville, Poe, Hergé, Peyo, Malraux, etc. eux, ce sont des auteurs. Mais… peut-on considérer que Tim Boucher soit aussi un auteur aujourd’hui ?
Et puis, si on part du principe que les rédactions de nombreux sites sont aujourd’hui générés par des IA, cela revient à dire qu’il y a des concepteurs-rédacteurs dont le métier n’est plus d’écrire. Mais simplement de commander à une machine de le faire. Puis, de relire. Et de lui indiquer des correctifs. C’est chiant, non ?…
Ce genre de bullshit job a-t-il réellement un avenir ? Y’a-t-il vraiment des gens qui – quotidiennement – se complaisent à ne plus savoir écrire, et à poser leur cerveau sur une table… Jusqu’à se laisser dicter par les outils génératifs ? Lesquels – couplés à des indicateurs SEO fournis par d’autres éventuels outils web – prennent finalement toutes les décisions. Autrement dit, écrire de la merde sans savoir le faire, mais avec un outil qui automatise nos écrits… ça va marcher combien de temps ? Bonjour le syndrôme de l’imposteur !
Quand on écrit pour le SEO, on oublie parfois le sens même du texte qu’on délivre.
Car il y a d’abord un objectif mesurable : volume de trafic, position sur les mots-clés, optimisation des clics dans les SERPs etc. De mon côté, l’objectif n’est ni commercial. Ni celui d’un éventuel personal branding. Je fais ça avec la simple volonté de partager quelque chose en toute sincérité. Point.
Et finalement, je constate avec surprise que mes contenus se retrouvent naturellement bien référencés. Et que – surtout – j’ai quelques lecteurs ! Car à mon grand étonnement – et malgré les TikTok et autres Shorts sur Youtube – des gens lisent mes textes. Même lorsqu’ils sont très longs ! Une partie de mon entourage, certes. Mais aussi des inconnus tombés par hasard sur mes récaps. Et leurs commentaires bienveillants – qui reprennent parfois des anecdotes de mes histoires – sont un véritable moteur dans mon travail d’écriture.
Alors finalement… les sites dédiés à l’affiliation ou les sites médias quels qu’ils soient ne devraient-ils pas tous être unis par la même motivation ? Délivrer un vrai contenu de qualité, sincère. Et qui traduit une vraie émotion ? L’IA est-elle réellement capable de faire ce travail ? Je ne le pense pas. Et surtout : je ne le souhaite pas !
Commentaires récents